« Et toi, d’où est-ce que tu viens? » C’est une question d’apparence simple, et pourtant je la vois toujours avec appréhension.
La réponse, pour moi, est à la fois complexe, composée de plusieurs niveaux et, souvent, incomplète – du moins à mes yeux. Je suis née au Sénégal (mais n’y ai jamais vécu) de parents sénégalais et cap-verdien qui se sont rencontrés à Aix-en-Provence. Mais c’est au Canada que j’ai vécu la majeure partie de ma vie. Avant d’arriver à Montréal pour faire mes études universitaires, en 2002, je n’avais jamais vécu plus de 5 ans au même endroit, ayant grandi à la fois aux États-Unis et dans plusieurs pays du continent africain. J’ai été élevée dans un foyer on ne peut plus mixte, avec des religions, des gens et des points de vue divers. Alors, d’où est-ce que je viens? À quel groupe est-ce que j’appartiens? C’est un peu compliqué.
Le changement ayant toujours fait partie de ma vie, j’ai décidé de voir ma facilité d’adaptation comme l’une de mes plus grandes forces. Mais au cours des deux dernières années, j’ai commencé à me demander si cette adaptation n’était en fait pas juste une tentative de couverture. Quand je suis dans une salle pleine de gens qui se ressemblent et qui parlent de la même manière, je suis souvent l’« autre », avec certaines couches visibles, et d’autres non.
L’assimilation, c’était mon mécanisme de survie pour avoir un sentiment d’appartenance.
Mais en fait, que veut-on vraiment dire par « appartenance »? J’avais appris lors de mes études en psychologie la pyramide des besoins de Maslow, qui indique que l’appartenance est une étape cruciale de l’épanouissement. Appartenir, c’est se sentir valorisé, vu et accueilli pour ce qu’on est, c’est ce qui nous permet ensuite de grandir. De s’épanouir. Pour bâtir une culture axée sur le sentiment d’appartenance, il faut partager nos récits et nos expériences vécues dans un environnement où l’on se sent psychologiquement en sécurité. Ainsi, les différences sont permises, ce qui renforce l’empathie et, en fin de compte, le sentiment d’appartenance, tandis que nos récits sont entendus et appréciés.
Cette culture, c’est celle que dentsu Canada veut mettre en place.
C’est aussi le travail que nous accomplissons. Nous racontons des histoires. Nous créons des récits que le monde voit et estime. Nous avons à la fois le privilège et l’ambition de raconter des histoires qui permettent aux gens de ressentir ce sentiment d’appartenance. Mais il y a beaucoup d’histoires que nous devons raconter :
« Les récits, les nombreux récits sont importants. Par le passé, les récits ont été utilisés pour déposséder les gens, pour les diffamer, mais ils ont aussi le pouvoir de les humaniser, de renforcer leur autonomie. Les récits ont le pouvoir de briser la dignité d’un peuple, mais aussi de réparer cette même dignité. » (Chimanda Ngozi Adichie, The danger of a Single Story [traduction libre]).
Voilà pourquoi nous nous sommes engagés à intégrer la diversité, l’équité et l’inclusion à l’échelle de notre entreprise : dans nos systèmes et processus, nos comportements et décisions, le travail que nous faisons pour nos clients, nos partenaires et notre chaîne d’approvisionnement. Les différents croisements de mon expérience vécue font de moi une personne différente, une « autre », mais ils sont aussi un privilège. Ma force, c’est de raconter cette expérience et de socialiser avec les gens, de faire preuve de curiosité face à leur réalité unique, d’accueillir leur récit à bras ouverts.
C’est là, je pense, que j’appartiens. À ce croisement.